Quand Épictète fait dialoguer un tyran et son esclave,
il fait déclarer à ce dernier : “ Tu as beau me menacer, je te dis que je
suis libre ( ... ) Tu es le maître de ma carcasse, prends-la. Tu n’as aucun
pouvoir sur moi. ” Le stoïcien conçoit donc la liberté comme liberté
intérieure résultant de la victoire contre ses craintes ( ici, de la mort ) et
ses désirs. Discours insensé pour ses contemporains car paradoxal : un esclave,
par définition, ne peut pas être libre au sens purement civique que donne la
société antique à cet adjectif. Le stoïcisme oppose donc à la liberté
politique alors seule admise la liberté morale vécue dans le repli sur soi. La
philosophie occidentale lui donne par la suite raison.
Mais après la Seconde Guerre mondiale, Hannah Arendt,
philosophe étasunienne d’origine allemande, dénonce Stoïciens, Chrétiens et
autres adeptes du libre-arbitre pour ramener la liberté dans le champ de la vie
publique. Elle renoue donc avec le sens antique tout en le dépassant car dans
les démocraties du XX° siècle, contrairement à la démocratie grecque, la
liberté ne va pas sans l’égalité et ne peut donc plus se définir comme le
contraire de l’esclavage.
Alors “ qu’est-ce que la liberté ? ” demande
Arendt en titre de la quatrième partie de La crise de la culture. La
liberté est politique au sens premier du terme, elle n’a d’existence que dans
la polis, la cité, l’espace que les citoyens ont en commun ( la société,
l’État ). Seul, on n’est ni libre ni esclave. Est donc libre celui qui a le
souci de contribuer à la vie collective et sort de chez lui pour parler et agir
en public. La liberté exige du courage car elle demande que l’on s’expose
au regard des autres et à leur jugement, que l’on se confronte à eux dans la
discussion des actions à mener pour la communauté.
La liberté réside ainsi dans la pratique “ politique
”, en entreprenant quelque chose pour le monde qui a accueilli chacun d’entre
nous à sa naissance et que nous léguerons à d’autres à notre mort. La liberté
est la chance laissée à l’homme de pouvoir commencer quelque chose, de créer de
la nouveauté qu’il partagera avec les autres. L’engagement politique fait
l’histoire : les hommes, “ parce qu’ils ont reçu le double don de la liberté
et de l’action, peuvent établir une réalité bien à eux. ”
Pour connaître la pensée d’Épictète, télécharger le Manuel
sur : http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/file/epictete_manuel.pdf
Pour un aperçu général des thèmes développés par
Arendt : http://www.ac-grenoble.fr/PhiloSophie/logphil/auteurs/arendt.htm
Le livre d’une spécialiste d’Arendt pour être guidé
dans la lecture des ouvrages de celle-ci : http://philo.discipline.ac-lille.fr/ressources-pedagogiques/documents/notes-de-lecture-1/anne-amiel-la-non-philosophie-de-hannah-arendt-282-pages-coll.-pratiques-theoriques-p.u.f.-mai-2001-par-alain-billecoq
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